L’essor de la finance islamique est de devenu de plus en plus perceptible avec l’ouverture de banques dites islamiques, l’ouverture de fenêtres islamiques dans les banques conventionnelles (en Angleterre par exemple) et la mise en place d’assurances dites takafoul.
Pourquoi cet engouement pour la finance islamique ? Naît-elle d’un réel besoin ou l’enrichissement des pays du golf cette dernière décennie avec un prix du pétrole en forte augmentation, peut elle influencer sérieusement la finance mondiale ?
Si aujourd’hui, on peut citer des chiffres, il est moins facile de connaitre son fonctionnement, les principes sur lesquels elle repose et les outils dont elle dispose. La finance islamique s’est traditionnellement développée dansa les pays de tradition musulmane. À l’origine les premières expériences de banques islamiques remontent de 1960 avec notamment la caisse d’épargne rurale en Egypte. L’année 1975 marque une étape importante dans l’essor de la finance islamique avec la création de la BID (banque islamique de développement).
Cependant certains pays comme le Pakistan, l’Iran et dans une moindre mesure le soudan ont décidé d’opter pour conformité a la loi religieuse leur système bancaire. C’est ainsi que le Pakistan a opté dans les débuts des années 1980 pour une démarche progressive avec une période de transitoire avant une islamisation complète de son système bancaire en 1984.
Plus récemment, depuis le début des années 1990, la finance islamique a été introduite de manière plus volontaire dans certains pays du golf et de l’Asie (la Malaisie et l’Indonésie).
La finance islamique est un système économique basé sur les principes du coran (livre saint des musulmans) et la sunna (paroles et actes du prophète de l’islam).
La finance islamique repose sur six grands principes. • L’interdiction du RIBA (intérêt usuraire) Littéralement Riba veut dire tirer profit, augmenter. Plus communément traduit par intérêt, ce vocable englobe autant l’intérêt que l’use. « Dieu a rendu licite le commerce et illicite l’intérêt »
Les références coraniques l’interdisant sont nombreuses (sourate 2 versets 275-276-278-279, sourate 3 verset 130, sourate 4 verset 161, sourate 30 verset 39). • L’interdiction de l’incertitude et de la spéculation
En islam, tout échange à caractère aléatoire ou possédant un élément vague, imprécis, ambigu, incertain caché ou dépendant d’un autre événement est proscrit. Ceci est tiré du hadith suivant : « le prophète interdit l’achat d’un animal non né dans la matrice de sa mère, l’achat du butin de guerre.... ».
La spéculation renvoi aux jeux de hasard, il s’agit du fait de parier sur la réalisation d’un événement en se basant sur des appréciations subjectives du futur.
• Les secteurs illicites
Les secteurs illicites découlent des entre autres des points vus ci-dessus ainsi que les principes moraux et éthiques de l’islam. Parmi ceux-ci on peut citer les banques d’assurances, l’alcool, les jeux de hasard, l’industrie porcine et alimentaire illicite, le tabac...etc.
• Principes des 3P
Les différentes parties a contrat participent a la fois aux pertes et aux profits dans le cadre du projet financé L’entrepreneur et le financier s’entendent sur une clé de répartition de répartition des gains comme des pertes.
• Actif tangible
Une opération commerciale doit être obligatoirement adossée d’un actif tangible, comme le financement d’un complexe immobilier par exemple. La finance islamique utilise différents modèles de financement, parmi ceux, les plus utilisés sont :
- La Murabaha
Financement à court terme, ce produit consiste en l’achat par la banque d’un actif qu’elle revend à terme à ses clients avec une marge préétablie. Le remboursement peut s’effectuer en une fois ou en selon un échéancier fixé lors de la conclusion du contrat. Il est essentiel que la banque soit propriétaire de l’actif avant de le revendre sinon cela est comme considéré comme de l’in téret.il est noté que pour ce type de financement deux contrats sont signés (achat et vente).ce contrat est le plus usité par les banques puisque 70% des financements se font par Murabaha.
- La Mudaraba
Contrat par lequel la banque apporte l’ensemble des capitaux financiers nécessaires au projet de l’entrepreneur qui lui va apporter son capital travail. Les profits et les pertes sont partagés selon une clé de répartition définie à la conclusion du contrat. En cas de perte, la banque subie une perte financière et l’entrepreneur subi une perte de son cout d’opportunité (temps et travail).
- Musharaka
Ce contrat fonction comme la Mudaraba à la différence qu’il y’a plusieurs apporteurs de fonds et que l’entrepreneur fait également un apport en capital. Les bénéfices ainsi que les pertes sont partagés en proportion des apports de chaque partie. On distingue deux types de Musharaka
Musharaka définitive ou continue : le but pour les partenaires étant de rester impliquer dans le projet de façon définitive.
Musharaka dégressive : les apporteurs de fonds ont l’intention de se retirer du projet. L’entrepreneur remboursera selon un échéancier prédéterminé les apports des autres parties.
Qard Hassan Prêt de bienveillance, accordé par la banque à ses clients en situation précaire et ayant à faire face à des circonstances particulières (décès, mariages, étude.....). Ces prêts sont encouragés par le coran. « Quiconque fait à Dieu un prêt sincère, Dieu le lui multiplie et il aura une généreuse récompense » (s57, verset 11) La finance bien vraie qu’étant dans une phase évolutive extraordinaire, fait face à beaucoup de contraintes qui pèsent sur elle.
§ Les contraintes économiques, géographiques
La finance islamique est fortement corrélée à l’évolution des cours du pétrole et concentrée en termes d’actifs dans les pays du golfe (CCG) et en Malaisie. Les vicissitudes du marché du pétrolier (volatilité du prix du baril et tarissement des réserves) ne peuvent garantir une permanence des niveaux de recettes atteintes ces dernières années bien que la demande ne cesse d’augmenter.
§ Les contraintes organisationnelles
Les banques islamiques doivent prendre en compte les exigences liées aux normes de Bâle II destinées à mieux appréhender les risques bancaires et principalement le risque de crédit ou de contrepartie et les exigences en fonds propres. Les différentes interprétations de la jurisprudence musulmane, liées aux 4 écoles juridiques (Hanafites, malékites, chafiites et hanbalites) par les Sharia Board(conseil de sharia=organe consultatif au sein de la banque islamique composé de juristes spécialisés dans la jurisprudence islamique commerciale chargé de superviser les produits et les activités pour assurer pour en assurer leur conformité avec les principes islamiques ) peut être source de divergences dans l’élaboration de produits financiers. Cependant la différence d’interprétation peut être perçue comme un élargissement de la gamme de produits proposés (une richesse).
§ Les contraintes humaines
La finance islamique manque de cadres dotés d’une double compétence (Finance/Fiqh) notamment en Europe et aux Etats-Unis en ce qui concerne les techniques financières et les compétences en droit musulman. L’université d’Harvard a quant à elle, créer un département de finance islamique. Les pays du Golfe sont, eux, déjà dotés de formations particulières. Les plus pessimistes estimations chiffrent le besoin de spécialistes à 2000 dans les 10 prochaines années. Aujourd’hui ils ne sont qu’une centaine....En ajoutant qu’il faut au minimum 10 ans de formation pour former un spécialiste !! La finance reste fortement marquée par le facteur historico-religieux quant à la localisation géographique de ses actifs. Cependant la globalisation économique et financière et un prix du baril de pétrole de plus en plus cher permettent à la finance islamique de s’exporter à travers le monde pour apparaitre, de plus en plus comme un système financier à part entière.
Ibrahima NDIAYE Titulaire d’un master 2 en méthode Statistiques et économétrique Gérant de la mutuelle d’épargne et de crédit islamique du Sénégal (MECIS) Email : [email protected]
Source : http://www.aeems.info/